Histoires comme ça

De jolis mots pour de belles histoires

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Par Thomas Weill
2 févr. · 4 mn à lire
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Epilogue

Ça y est, Histoires comme ça, c’est terminé pour l’instant. Près de 15 mois après le lancement de cette newsletter, au bout de 30 épisodes hormis le texte que vous êtes en train de lire, avec plus de 2500 pages vues.

Ce chiffre, indépendant du taux d’ouverture de mail, qui dans mon cas se trouve à 53,6 %, signifie qu’en moyenne, chaque épisode a été consulté sur la plateforme 83,33333333333333333333333 fois, par des personnes abonnées ou non. Je sais ce que vous vous dites, et je me dis la même chose : qui est donc ce tiers de personne qui est allé lire chacune de mes histoires ? Peut-on considérer qu’il ou elle ne lisait que d’un œil ? Où n’accordait à ma prose qu’une fraction de son attention ?

Bon allez, je m’emballe. Je m’emberlificote dans ce dernier texte, laissant glisser une blague douteuse. La raison est simple : vous êtes en train de lire ma cinquième tentative d’écrire ce texte de fin. En somme, je galère. L’exercice en lui-même, écrire son dernier texte, n’est pas simple, mais j’ai aussi beaucoup de mal à écrire ces derniers temps. Au fil des 15 mois et 30 épisodes d’existence de cette newsletter, j’ai eu de plus en plus de difficultés à tenir le rythme que je m’étais imposé. Je trouvais cela important de m’y tenir tout de même, puisque j’avais pris des engagements auprès de vous, mais j’ai parfois eu le plus grand mal à boucler mes histoires en temps et en heure. J’ai même fini par publier des nouvelles que je n’avais pas l’intention de diffuser ici.

Garder le plaisir d’écrire

Cela m’a permis de réaliser que pour moi en tout cas, productivité ne rimait pas forcément avec créativité. J’ai cherché à me professionnaliser en écriture, ce qui était une bonne chose, mais je me suis mis la pression avec des attentes productivistes qui ne correspondent pas à ma manière de travailler. Je me suis essoufflé, j’ai commencé à avoir moins d’idées, à moins estimer la qualité de ce que j’écrivais (même si j’ai toujours fait de mon mieux pour vous proposer des textes de qualité) et je me suis progressivement vidé de mon allant en matière d’écriture, que ce soit pour la newsletter ou pour d’autres projets. C’est d’ailleurs l’une des raisons principales qui m’ont poussé à choisir d’arrêter « Histoires comme ça » : je ne voulais pas continuer de travailler de cette manière, avec la pression que je me mettais, au risque chaque jour grandissant de perdre le plaisir d’écrire. Je n’ai pas non plus touché depuis plusieurs mois à mes autres textes en cours de rédaction, en l’occurrence un roman et deux novellas.

Je trouverais ça normal que les auteurs et autrices, et les artistes en général, puissent vivre décemment de leur art alors qu’ils et elles sont nombreux·ses à vivre sous le seuil de pauvreté (à ce sujet, un rapport présenté devant le Parlement européen pourrait bien changer la donne et les protections offertes par le statut artiste-auteur si la Commission européenne décide de s’emparer du dossier. Un article court du média Actualitté résume bien la situation si ça vous intéresse, et vous pouvez aussi signer cette pétition pour soutenir « l’amélioration des conditions de travail et de protection sociale des professionnel·les des secteurs de la culture et de la création ») ; mais à mon sens, pratiquer un art à titre professionnel doit aussi rester une source de plaisir et d’épanouissement pour l’artiste. Donc, quelque peu paradoxalement, j’ai décidé de temporairement arrêter d’écrire pour conserver le plaisir d’écrire (si vous avez suivi, ça devrait tout de même avoir du sens).

Merci !

Nonobstant mes difficultés chroniques avec l’écriture ces derniers mois, et les questions que cela soulève pour moi concernant mon rapport à l’écriture et au travail en général, un texte de fin, cela ne s’improvise pas. Il s’agit d’un savant mélange de bilan dressé, d’apprentissages acquis, de satisfaction et de fierté, peut-être un soupçon de regret, beaucoup de reconnaissance aussi. L’équilibre est délicat. La reconnaissance, parlons-en justement. Vous n’étiez pas assez nombreux et nombreuses pour remplir un stade de France, autant lever le voile sur cette incertitude sans attendre, mais au plus fort, vous avez tout de même été 100 personnes à me suivre, ce qui n’est pas rien, et a le mérite d’être un chiffre rond qui facilite le calcul des pourcentages. Je voulais donc vraiment vous remercier pour vous être abonné·e à cette newsletter, parfois même avec un abonnement payant ou premium, et pour avoir lu mes histoires quand vous en avez eu le temps ou l’envie. J’espère que vous avez apprécié les voyages littéraires que je me suis efforcé de vous proposer. Même si j’entends apprécier ce que je fais, c’est aussi et surtout pour vous qui me lisez que j’écris, car sans vous tout ceci ne rimerait à rien, ou n’aurait en tout cas pas la même dimension ni la même importance pour moi, donc merci infiniment pour votre soutien et votre générosité.

Je l’ai déjà dit lors de mes annonces précédentes d’arrêt de cette newsletter, mais j’ai dépublié certains textes qui étaient réservés à mes abonné·es payant, donc si vous aviez souscrit à un abonnement payant et que vous n’avez pas eu le temps de lire tous mes textes, n’hésitez pas à me faire signe pour que je vous les fasse parvenir.

Et après ?

Bon, à présent que je vous ai dit tout ça, vous vous demandez peut-être quelle sera la suite s’il y en a une. Soyez donc rassuré·e (ou pas), j’ai toujours l’intention de continuer d’écrire. C’est même tout le principe de l’arrêt de cette newsletter : en acceptant d’écrire moins, et pas du tout pendant quelque temps, je souhaite parvenir à terme à écrire mieux, et en prenant du plaisir à l’ouvrage, sans me focaliser sur des chiffres, des nombres d’abonnés, de la régularité dans mes publications, etc. Ce sont des atouts qui peuvent beaucoup aider, qui peuvent même faire une carrière, mais ce n’est pas là-dessus que je veux bâtir la mienne. D’autres auteurs et autrices seront forcément meilleurs que moi en communication et en marketing, donc je choisis pour l’instant d’accepter ça et de retourner à une phase plus discrète de l’écriture, tant pis si moins de gens lisent ce que j’écris du moment que celles et ceux qui liront mes textes les apprécient. Je vous enjoins néanmoins à rester abonné·e à cette newsletter, gratuitement, puisque je n’exclus pas de republier des histoires courtes par ce biais-là à l’occasion. Si vous êtes intéressé·e, je me servirai aussi de ce canal pour vous tenir au courant d’éventuelles annonces importantes, par exemple la publication d’une nouvelle si cela advenait, ou, sait-on jamais, de mon deuxième roman une fois que je l’aurai terminé (notez que j’ai écrit cette fin de phrase au futur, on y croit). Comme je ne pense pas que les choses soient gravées dans le marbre, je n’exclus pas non plus de reprendre un jour une formule de publication plus régulière ici, si je constate que je me trouve dans l’état d’esprit qui s’y prête. Bref, tout est ouvert pour la suite ! Je vais également laisser une quinzaine de textes en ligne sur cette plateforme, ils seront consultables par tous et toutes à tout moment, pour le cas où vous seriez nostalgique.

Lancer « Histoires comme ça » avec en prime une version payante avait quelque chose d’un pari. On m’avait mis en garde contre le fait que cela pouvait être prématuré, cela n’a d’ailleurs pas tout à fait marché à la hauteur de mes espérances, mais je suis content d’avoir lancé ce projet, d’avoir persévéré quand je ne parvenais plus à écrire de nouvelles histoires, et d’être parvenu à faire durer cette newsletter sur une année entière d’abonnement payant. Si vous m’avez suivi jusque-là, encore une fois je tiens à vous remercier du fond du cœur. J’espère que vous avez apprécié de voyager avec moi dans mes histoires, ce serait ma plus grande fierté. Enfin presque. J’ai quand même calé le mot « nonobstant » dans cet épisode, et le verbe « pandiculer » dans ma nouvelle « Dans la peau », et ça, pour qui comme moi aime les jolis mots et les mots rares, ça a franchement de la gueule.

Sur ce, je vous laisse, et je vous dis à bientôt, ici ou ailleurs.


Vous n’avez pas encore lu le précédent épisode ? Rendez-vous ici !

Vous pouvez aussi vous procurer mon roman ici, et me retrouver sur Instagram et sur Facebook.